#8 Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans médicaments ni psychanalyse

#8 Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans médicaments ni psychanalyse

Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans médicaments ni psychanalyse

Le titre est plein d’espoir n’est-ce pas ? Il n’est pas de moi et je rends tout de suite à David Servan-Schreiber les lauriers. J’ai une immense gratitude pour ce médecin, qui a pris le temps et l’énergie d’écrire cet ouvrage, que j’ai lu en 2005. Une émission de France Inter m’a donné envie de le reparcourir, et m’a donné l’élan d’écrire cet article sur la dépression.

Tout d’abord, je vais décrire ce qu’est la dépression. Ensuite je vais passer en revue les solutions données par David Servan-Schreiber pour y faire face. Et vous verrez que même au bout de 20 ans, ces solutions sont largement valables !

C’est quoi la dépression ?

Définitions

De quoi parle-t-on ? Comme d’habitude j’aime commencer par les définitions. D’après le CNRTL, il s’agit d’une « perturbation du dynamisme de la vie psychique, qui se caractérise par une diminution plus ou moins grave de l’énergie mentale, une certaine pente de l’affectivité qui est marquée par le découragement, la tristesse, l’angoisse. » 

Pour le Larousse, c’est un « état pathologique marqué par une tristesse avec douleur morale, une perte de l’estime de soi, un ralentissement psychomoteur. » 

Pour l’étymologie, le mot désigne à l’origine un creux dans une surface, venant du latin depressio (abaissement, enfoncement).

Pour le DSM 5 (« Diagnostic and Statistical Manuel of mental disorders », un manuel de référence publié par l’association psychiatrique américaine), pour déclarer un épisode dépressif majeur, au moins 5 symptômes doivent être présents pendant une période de 2 semaines, presque tous les jours, dont 1 des symptômes doit être l’humeur dépressive (presque toute la journée), ou la perte d’intérêt ou de plaisir. Les autres symptômes sont : la perte ou le gain de poids significatif, l’insomnie ou l’hypersomnie, l’agitation ou le ralentissement psychomoteur, la fatigue ou perte d’énergie, le sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée, la diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer, les pensées de morts récurrentes. (J’ai légèrement simplifié cela). Les critères de la CIM-10 (Classification Internationale des maladies de l’OMS) sont proches du DSM pour la dépression majeure.

Bien sûr, il y a toute une gradation selon l’intensité et le nombre de symptômes. La dépression de Paul ne ressemble pas à celle de Jacques. Tout de même, il est important de ne pas confondre une déprime et une dépression. La dépression est une maladie. A ceux qui seraient tentés par dire à un ami en dépression de se bouger… c’est inutile et probablement contre-productif ! D’ailleurs, vous ne le dites pas à votre ami grippé et couché dans son lit.

Un dernier mot par rapport à la phase de dépression d’un deuil.  Il ne s’agit pas à proprement parler d’une dépression. C’est une phase d’immense tristesse et abattement lié à la perte de l’être cher. A noter que le DSM 5 n’exclut plus le deuil dans les épisodes dépressifs (décision controversée parmi les psychiatres qui s’inquiètent d’une pathologisation du chagrin).

Qui cela concerne-t-il ?

Selon Santé publique France et l’Inserm, 20% des français connaitront un épisode dépressif dans leur vie. Et 10 à 20% des personnes souffrant de dépression meurent par suicide. Il y a environ 9000 suicides par an en France (le triple des accidents de la route). Je précise que toutes ces données datent de l’avant Covid (et donc que ces chiffres ne vont certainement pas s’améliorer dans les années qui viennent, au vu des alertes nombreuses d’augmentation de troubles dépressifs et de suicides pendant cet épisode mondial).

Il n’y a pas de personne type qui puisse subir un épisode dépressif majeur. Certains facteurs de risque existent (décès, chômage, séparation ; traumatismes de l’enfance), mais la variabilité est grande : certains sujets déclenchent une dépression sans facteur déclenchant apparent.

Le fait d’avoir un des parents avec un antécédent de dépression multiplie les risques de développer un épisode dépressif par 2 à 4. Les gènes n’ont pourtant qu’une faible incidence et c’est surtout l’influence de l’environnement qui va jouer, y compris sur l’expression des gènes. 

La maladie est ainsi plurifactrorielle : contexte de vie actuel, enfance et éducation, état physique et biologique : inflammation chronique, microbiote intestinal…  

Thérapie

La première intention est de consulter un médecin en cas de doute. Au moins son médecin traitant, sinon un psychiatre.

La deuxième intention, que l’on soit ou non traité avec des médicaments, est de faire une psychothérapie. Les médicaments sont en effet là pour soutenir la personne, atténuer les symptômes… mais ne vont pas résoudre le problème.

Pour David Servan-Schreiber, les thérapies doivent inclure le corps (contrairement a la psychanalyse freudienne classique) et les émotions, et je ne peux qu’être d’accord avec lui. Il mentionne 2 thérapies dans son ouvrage : l’EMDR et l’acupuncture. (Il ne parle pas de médicament ou de psychothérapie, mais il me semblait important de préciser ces points). 

L’EMDR (Eye Movement Desensibilsation and Reprocessing, soit désensibilisation et retraitement par les mouvements occulaires) est une méthode mise au point par la psychologue Francine Shapiro, et qui est particulièrement adaptée à l’état de stress post traumatique.

L’acupuncture, cette médecine chinoise millénaire, est conseillée en particulier dans le cas où la personne souffre physiquement.

Hygiène de vie

C’est là-dessus que je vais m’attarder. En cas de symptômes légers, une bonne hygiène de vie suffira probablement à soulager grandement et peut-être complètement les symptômes dépressifs. Mais de quoi est constituée cette bonne hygiène de vie selon David Servan-Schreiber ?

Cohérence cardiaque

La cohérence cardiaque mériterait à elle seule un article à part entière ! Je vais essayer de synthétiser quelques informations me semblant essentielles, mais qui seront de fait possiblement simplifiées.

Lorsque nous sommes mal (stressés, en colère, anxieux…), notre rythme cardiaque varie de manière chaotique, irrégulière. A l’inverse, quand nous sommes dans un état de bien-être, le rythme évolue de façon « cohérente » : il forme une sinusoïde assez régulière. 

 

Dans cet état de cohérence, les deux branches de notre système nerveux autonomes sont équilibrées : la branche sympathique (qui agit comme un accélérateur), et la branche parasympathique (qui agit comme un frein). Ainsi, dans cet état, la gestion du stress, la régulation émotionnelle sont plus aisées.

L’idée est donc de chercher à recréer cet état de cohérence cardiaque, alors que nous ne sommes précisément pas dans un état de bien-être.

Pour commencer, prendre 2 à 3 expirations et inspirations lentes et profondes (inspiration par le nez, expiration par la bouche, c’est encore mieux pour activer le parasympathique qui est le but de cette première étape).

Puis se centrer sur l’espace du cœur. Il est possible de le visualiser, de le ressentir.

Pour faciliter l’entrée en cohérence cardiaque, on peut ensuite respirer selon un rythme de 6 cycles de respirations par minute. Ainsi on inspire sur environ 5 secondes, on expire sur environ 5 secondes. Le tout pendant au moins 5 minutes

Pour cela, la pratique s’étant fortement démocratisée depuis l’écriture du livre de David Servan-Schreiber qui a introduit cette pratique en France, plusieurs applications de téléphone ou vidéos sur le web existent. (J’utilise Repirelax + ).

L’idéal est de garder notre pensée centrée sur le cœur, par exemple en visualisant que la respiration se fait à travers lui. Une sensation de chaleur, d’expansion peut alors naître. On peut même ressentir de la gratitude. Amplifier et laisser vivre ses sensations ne peut que décupler les effets de la séance.

Les bénéfices de ces 5 minutes sont mesurables pendant plusieurs heures. Pour un effet tout au long de la journée 3 séances sont ainsi conseillées. Les bienfait au long court (au moins 6 semaines) sont importants et ont été mesurées dans diverses études : stress et dépression, système hormonal, système immunitaire, état physique général.

Luminothérapie

Le rôle de la lumière est connu dans la dépression saisonnière. Cette dépression est assez importante puisqu’elle touche environ 10% des gens en France. Notre corps et l’ensemble des processus biologiques sont en effet très sensibles à la lumière du soleil. C’est encore plus vrai dans nos sociétés industrialisées, vivant peu dehors et baignés dans une lumière électrique bien plus faible que la lumière naturelle du soleil. S’il est normal d’avoir une baisse d’énergie dans nos contrées avec l’arrivée de l’hiver, et au contraire un regain d’énergie à l’arrivée du printemps, il est peu confortable de souffrir de symptômes dépressifs. Ainsi l’usage d’une lumière forte (10 000 lux au moins, que l’on trouve avec les lampes de luminothérapie), 30 minutes par jour le matin, a des effets concrets sur la dépression saisonnière en environ 2 semaines. L’usage de telles lumières peut également être utile en cas de décalage horaire suite à des voyages professionnels fréquents par exemple. L’idée pour moi n’est donc pas d’aller à l’encontre d’un mouvement naturel de repli, d’intériorité pendant l’hiver, mais de pouvoir soulager des symptômes désagréables liés à la saison ou à un décalage horaire.

David Servan-Schreiber met en avant l’usage de simulateur d’aube pour se réveiller le matin. L’intérêt est de préparer son corps au réveil, grâce à la lumière qui s’allume progressivement, en imitant donc le soleil levant. J’imagine que certains pourront choisir un simulateur d’aube gratuit en dormant à la belle étoile, mais ce n’est pas forcément évident dans une vie urbaine avec des horaires de bureau. Cette simulation peut être bénéfique à tout un chacun, que l’on soit en dépression ou non. Cela permet en effet de ne pas interrompre brutalement le sommeil paradoxal (quand on rêve) par une sonnerie de réveil !

Omégas 3

Les omégas 3 font partie des acides gras essentiels, c’est à dire que le corps ne peut pas fabriquer : ils doivent être apporté par l’alimentation. Ces acides gras servent en particulier à alimenter notre cerveau, car ils en constituent les deux tiers. Les omégas 3 dans le cerveau permettent d’assurer bonne humeur et énergie ! Ainsi des études montrent que l’apport en oméga 3 soulage les symptômes dépressifs (tristesse, insomnie,  anxiété, manque d’énergie, baisse de libido), y compris pour les troubles bipolaires. 

Ces omégas 3 se trouvent dans les poissons gras : maquereaux, hareng, sardines…, ainsi que dans des huiles végétales lin, colza, chanvre, noix… Il est également possible de les prendre sous forme de compléments alimentaires, notamment dans le cas où l’on recherche un effet anti-dépresseur (2 à 3 g par jour d’un mélange EPA et DHA, avec EPA plus dosé).

Plus généralement, le régime méditerranéen, ou crétois, est recommandé pour les gens sujet à dépression (et j’ajoute que d’un point de vue santé, il a également beaucoup d’autres intérêts).

Activité physique

Le sport ou l’activité physique est certainement la solution la plus connue que je vous présente dans cet article pour guérir ou prévenir des épisodes dépressifs. Je crois même qu’un des mécanismes physiologiques, qui est la sécrétion d’endorphines, n’a plus de secret pour grand monde : ces endorphines ont un effet anti-dépresseur et anxiolytique. Un autre mécanisme est le fait que faire une activité physique soutenue permet d’arrêter le flux mental de pensée négatives, voire même de passer à des pensées positives. Enfin, les personnes pratiquant régulièrement une activité physique ont une meilleure cohérence cardiaque, un système parasympathique (le frein) plus fort (cf. paragraphe sur la cohérence cardiaque).

Pour les réfractaires au sport, il est utile de signaler qu’il n’est pas besoin de s’entraîner à faire un marathon ! Une activité physique régulière, soutenue mais pas au-delà de nos limites, de minimum 20 minutes, 3 fois par semaine, suffit pour voir un effet sur le cerveau. (A noter que plus les symptômes sont sévères, plus il faut augmenter le rythme et l’intensité de l’activité)

Le type d’activité n’est pas impactant. Ce qui compte, c’est la régularité. Ainsi, les activités en groupe peuvent être un bon moyen de faciliter l’engagement. Par rapport aux emplois du temps compliqués, il est possible d’aller au travail en faisant cette activité (vélo, marche). Et surtout, il est conseillé de choisir une pratique qui nous plaît pour la poursuivre dans le temps.

Communication émotionnelle (non violente)

David Servan-Schreiber part du constat que l’amour est indispensable dans nos vies. Les relations affectives ont une place centrale. C’est un des premiers critères du bonheur. Ainsi pour avoir des relations affectives de meilleure qualité, il nous propose de pratiquer une communication émotionnelle non violente. Il s’agit d’une communication assertive, qui permet de poser ses limites tout en étant aussi respectueuse des besoins d’autrui. Il cite d’ailleurs la communication non violente (CNV) de Marshall Rosenberg comme exemple d’une telle communication.

Pour permettre cette communication, plusieurs éléments sont à bannir : la critique, le mépris (des insultes les plus douces au plus violentes en passant par le sarcasme), la contre-attaque et le retrait total.

Pour favoriser cette communication, il s’agit d’utiliser des observations (objectives et précises), de parler de ce que je ressens, de parler de mon besoin (de pourquoi c’est important pour moi), et d’exprimer des demandes (et non des exigences). Cette communication requiert d’avoir une écoute empathique de soi été d’autrui. C’est tout un programme et c’est pourquoi il existe des formations à la CNV. Mais même avec une formation, la communication émotionnelle est un art qui s’affine avec la pratique et l’expérience, et dans lequel il est toujours possible de progresser…

Résumé

Par où commencer ? Quand on ne va pas bien, faire quelque chose peut-être du domaine de l’inaccessible. Alors outre aller consulter, évidemment, commençons par quelque chose de facile et qui fasse du bien très vite. La cohérence cardiaque avec une application me semble particulièrement recommandée. L’exposition à la lumière peut également être facile car très passive. Ensuite, j’ajouterai l’alimentation, en commençant par de l’apport en oméga 3 avant de changer tout son régime alimentaire, ce qui peut demander de l’énergie. L’activité physique, en commençant par une marche rapide 3 fois 20 minutes par semaine, par exemple. 

Enfin, j’irai sur le terrain de la thérapie et de la communication émotionnelle.

Dans cet article je suis quasiment exclusivement restée sur les pratiques décrites dans le livre de David Servan-Schreiber, pour qui j’ai une immense gratitude.

Depuis, je me suis enrichie d’autres pratiques (le froid, les bains de forêt par exemple) qui peuvent aider pour les symptômes dépressifs. Alors promis, ce sera l’objet d’un prochain article, qui est désormais disponible ici.

En synthèse, si vous vous retrouvez dans un état dépressif, mieux vaut consulter un psychiatre pour déterminer l’intérêt d’une prise en charge médicamenteuse, consulter un thérapeute pour aller libérer les poches émotionnelles bloquées du passé et mettre en place une bonne hygiène de vie pour remonter la pente.

Pour voir si l’accompagnement que je propose vous inspire c’est ici. 

Ressources complémentaires :

Guérir le stress, l’anxiété et la dépression dans médicaments ni psychanalyse de David Servan-Schreiber, publié en 2003

L’émission de France Inter qui m’a donnée envie d’écrire cet article

La HAS a réalisé une fiche synthétique regroupant les symptômes et critères du DSM5 et de la CIM-10 : 

https://www.inserm.fr/dossier/depression/

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